Et pour toujours

Croyez-vous aux contes de fées ?

Je ne vous parle pas de la recherche du prince charmant, mais de l’idée d’une quête définie. Celle d’un Graal, difficile d’accès, mais qui vous récompense au-delà de vos efforts par un état de sagesse et de sérénité où plus rien ne peut vous arriver.

En tout cas pour ma part, c’est l’objectif inconscient que j’avais intégré à la lecture des contes de fées. Le « et pour toujours » me tendait les bras pour peu que je m’attelle sérieusement à la tâche (chaque héros possède son épreuve). Depuis des années, je scrute sans relâche toutes les faiblesses qui m’empêchent d’atteindre mon but. J’avance, armée d’une détermination sans faille, vers le repos promis. « Et ils furent heureux pour toujours ». Le meilleur slogan publicitaire du monde.

Malgré tous mes efforts, je n’ai pas réussi. Enfin, en tout cas, pas de manière permanente. Chaque fois que je pense l’avoir trouvé, il me file entre les doigts. C’est trop bête, j’étais à ça de mon bonheur éternel. Et comme ça ne marche pas, le doute s’installe. Qu’est-ce que j’ai fait de travers ? Qu’est-ce que j’ai oublié ? Car bien entendu, si l’objectif se retrouve hors de portée, c’est que je ne suis pas à la hauteur. La mythologie regorge de faux héros dont les épreuves révèlent l’impuissance et l’orgueil.

Heureusement pour moi, je possède une résilience à toute épreuve et, comme je sais qu’on ne peut pas faire toujours la même chose et s’attendre à un résultat différent, j’ai modifié ma trajectoire. Si l’objectif est inatteignable, c’est qu’il ne s’agit pas du bon chemin ! Élémentaire mon cher Watson. Qu’à cela ne tienne, je remballe mes efforts et m’oriente vers la prochaine épreuve. C’est que le bonheur éternel, ça se mérite ! Un jour, j’y arriverai.

Les jours ont passé, les mois et les années aussi. Et je me suis épuisée à la tâche.

J’ai perdu confiance. En moi, évidemment. L’objectif était clair et bien défini, donc la pièce défaillante ne pouvait être que moi. Ma vitalité s’est effacée. Concentrée sur ma cible, j’ai vu trop tard que je n’avais plus les moyens de l’atteindre. Flûte, j’étais à ça… Pas de quoi en faire un drame, je récupère et je m’y remets.

Mais à quoi ? J’ai tenté tous les chemins auxquels j’ai pensé. Pas question de recommencer, j’ai retenu la leçon. Ne pas réitérer les mêmes erreurs. Alors quoi ? D’autres épreuves ? Un coup d’œil sur le catalogue suffit à m’en dissuader. Si je ne les ai pas entreprises plus tôt, c’est qu’elles sont disproportionnées pour moi.

Je suis épuisée par une quête qui a duré des années sans résultat et, même si je retrouvais la force de continuer, j’ignore où diriger mes efforts. Le « et pour toujours » s’éloigne. Je reste coincée dans mon quotidien, découragée et impuissante.

Et puis, un jour d’insomnie, la solution m’apparaît. Je suis créatrice de ma vie. Je crée parce que je ne sais pas faire autrement et j’adore ça. Alors qu’est-ce qui paralyse ma réalité ? L’objectif. J’ai modifié les épreuves, testé ma détermination, une seule alternative demeure. Et à ce moment-là, tout s’éclaircit.

Je suis parfaitement opérationnelle et à ma place. Les chemins que j’ai sélectionnés me conviennent. Mais je ne suis pas intéressée par le « et pour toujours ». Un, ça ne colle pas avec ma conception de la vie en perpétuelle évolution. Et deux, quoi créer dans un monde parfait ? Je ne suis pas pressée d’arriver à la fixité du bonheur éternel. Ce que je veux, c’est le construire au quotidien. Ajuster jour après jour ma vibration pour que la joie règne dans ma vie. Créer, expérimenter, découvrir, partager.