Au cœur de l’été, alors que l’inquiétude vis-à-vis de notre situation financière augmentait, j’ai décidé de reprendre un travail salarié. Une réalité difficile à extirper, mais qui m’a libérée.
C’était ça (avoir un revenu régulier), ou à terme vendre notre maison. Le choix s’imposait de lui-même. J’adore ma maison, avec toutes ses imperfections (mon cheminement intérieur laisse des traces visibles dans le jardin et la déco). Bref, ma décision était prise, je retournerai dans le creuset de l’emploi salarié.
Quelques réflexions plus tard, le tableau s’esquisse. Un emploi sans trop de responsabilités (pas facile d’être deux avec des horaires extensibles et un enfant), à proximité géographique et pas dans le domaine du bâtiment (j’ai déjà donné). Munie de ces résolutions, je commençai ma recherche. Pôle Emploi, Le bon coin, agences d’intérim, quelques offres me semblent convenir. Je peaufine mon CV et envoie mes premières candidatures. Objectif : débuter fin août, pendant les vacances de ma fille chez ses grands-parents, pour que les choses soient calées pour la rentrée.
Le lendemain, premier appel d’une agence d’intérim. Je complète mon dossier, et quelques jours plus tard, premier entretien pour un emploi dans la logistique. C’est nouveau pour moi, et j’aime découvrir de nouveaux horizons. Au niveau travail, tout est dans mes cordes, accueil, gestion de base de données, tâches administratives. L’entretien se passe bien (à mon avis), et on me promet une réponse dans la semaine. Deux semaines plus tard, toujours rien, malgré une relance de l’agence. Qu’à cela ne tienne, j’avais continué ma recherche et noté d’autres offres. L’une d’entre elles en particulier paraissait prometteuse. Notée urgente, elle concernait un emploi de secrétaire polyvalente dans un cabinet de géomètres. Suffisamment loin du bâtiment pour que cela ne me pèse pas, mais assez près pour que mes compétences soient valorisées, j’envoie mon CV. Réflexion faite, les horaires sont plus compatibles avec ma vie de famille, je modifie ma trajectoire sans trop de difficultés. Mon mental est un champion toutes catégories niveau résilience. Le plan A se révèle indisponible ? Ne vous inquiétez pas, le plan B le surpasse en tous points.
Fin août, le constat est clair. Le plan A est passé aux oubliettes. Les plans B, C, D et suivants ne se sont pas mieux déroulés. Je me rends compte que la notion d’urgence est relative quand la réponse (négative) arrive quatre semaines après une candidature pour un poste à pourvoir dès que possible… et encore, recevoir une réponse permet de clore le dossier, ce n’est pas toujours le cas.
La rentrée est passée. Je me suis organisée pour pouvoir démarrer rapidement. Ma fille retourne à l’accueil de loisirs du mercredi (pas très motivée), et je poursuis ma recherche. Au bout de quelques semaines, deux offres se détachent. A proximité géographique immédiate, elles proposent des horaires de bureau et des tâches administratives que je maîtrise. La première me plaît davantage (l’autre concerne un poste de téléconseillère, avec toutes les contraintes que cela implique), mais malgré plusieurs relances, je n’ai obtenu aucune réponse. Je me résous donc au deuxième. Les locaux sont agréables, et l’entretien s’est bien passé, avec des interlocutrices professionnelles et avenantes. Cette fois, ça va marcher. D’ailleurs, il faut que ça marche, car j’ai déjà pris plus d’un mois de retard dans mes prévisions, et le poste est à pourvoir mi-octobre.
Je respire un grand coup et lâche les peurs. J’ai confiance. J’ai toujours avancé avec une solution pour chaque problème. Parfois au dernier moment, avec quelques sueurs, mais c’est toujours passé. Cette fois ne fera pas exception. J’abandonne le côté temporel et savoure les jours de liberté qui me restent. Je mets sous le tapis mes doutes quand aux contraintes du poste, il faut que ça marche.
Quelques jours plus tard, nous sommes invités à l’anniversaire d’un ami. Un peu de fraternité nous fait du bien, c’est en petit comité et nous en profitons. Je discute avec l’un des participants. Voyageur, polyvalent, il s’intéresse aussi au développement personnel et à la manière de permettre à chacun de trouver sa place. Une rencontre inspirante, qui me laisse une bouffée de joie, et un peu d’envie. Pourquoi a-t-il obtenu un emploi qui lui plaît et pas moi ?
À ce moment-là, je ressors tout ce que j’ai mis sous le tapis et j’observe. Les récurrences et les concordances. Les échecs, les évitements et les peurs. Les croyances limitantes. Premier écueil, je ne sais pas ce que je veux faire. Enfin, si, mais ce n’est pas possible donc je ne perds pas de temps à l’envisager. Du coup, je tente de me convaincre que je peux me modeler pour correspondre aux postes disponibles. Me contraindre encore un peu. D’ailleurs, c’est ce que j’ai fait pendant longtemps, alors un peu plus un peu moins… Mais l’univers arrive à ma rescousse.
Des dizaines de candidatures et aucune réponse positive. Mon ego est malmené, mais si je considère que je suis parfaitement à l’endroit où je dois être, qu’est-ce que cela m’apporte ?
L’évacuation de toutes les couches de peurs les unes après les autres. La peur de manquer (de temps, d’argent, de volonté, de capacité). La peur de reproduire les échecs du passé.
À cet instant, une certitude s’installe. Je ne prendrai pas ce poste de téléconseillère. J’appelle l’agence d’intérim, pas très fière, mais déterminée, pour annoncer que je retire ma candidature. Quand je raccroche, j’ai l’impression d’avoir fait une bêtise. Énergétiquement, je sais que ma posture est juste, je me sens libérée d’un poids énorme. Mais comment le dire à mon entourage ? Ça fait des semaines que je me plains de ne pas trouver d’emploi salarié et, au moment où une réponse se profile, je me débine. Je respire, m’aligne et médite, mais je n’en mène pas large. J’en parle à une amie, mais pas à mon mari, j’appréhende sa réaction. Vingt-quatre heures plus tard, je reçois un appel du centre de télé-conseil. Ils n’ont pas retenu ma candidature. Un nouveau cadeau de l’univers. Je peux l’annoncer à mon mari.
Ce jour-là, j’ai eu chaud, mais mon action a débloqué quelque chose. J’ai quitté une position d’attente où je me sentais impuissante pour reprendre le pouvoir sur ma vie. Je ne vous cacherai pas que mon ego continue d’ergoter un peu (oui, mais alors ça veut dire qu’eux non plus ne veulent pas de toi), mais là, peu m’importe.
Car maintenant, je sais. Qu’autre chose se présentera. Dans quelques jours, quelques semaines ou quelques mois. Un emploi à ma mesure. Dans le domaine de l’édition ?