Au hasard
Nicolas marchait sur le trottoir, rentrant chez lui après sa journée. Il slalomait doucement entre les tas de neige et les plaques de glace quand il bouscula quelqu’un. « Pardon.
— Ah, Nicolas. Ça va mieux ? » Se demandant un instant à quoi Jessica faisait allusion, il se rappela l’histoire du rhume. « Oui, merci. » Levant les yeux vers la devanture du commerce d’où elle sortait, il ajouta « Tu as pris un verre chez Marco ? Il est sympa.
— Non. J’avais rendez-vous, mais il n’est pas venu.
— Oh. Je suis désolé. »
— Pas moi…
— Tu veux…
— … parfois il vaut mieux ça que passer la soirée avec un type sans intérêt. Pardon, tu disais ?
– Heu non, rien. » Nicolas se serait mis des claques. Elle était là, dispo, devant un bar, et il n’arrivait même pas à l’inviter ? Mais qu’est-ce qui clochait chez lui ? « Et toi, qu’est-ce que tu fais là ?
— Oh, je rentre chez moi. J’habite de l’autre côté du boulevard.
— T’as mangé ? » Moi ? « Heu, non.
— ça te dirait pas de prendre un truc chez Marco ? Il paraît que ses tartines sont sympas. » Moi ? Elle était sérieuse là ? Elle voulait dîner avec moi ? « Enfin, t’es pas obligé, hein, si t’as autre chose à faire…
— Oui.
— Ah, dommage.
— Non. Enfin je veux dire, oui, je veux bien manger un truc et non j’ai rien de prévu. » Ouf ! C’était pas brillant, mais au moins c’était dit.
« C’est vrai ? Super, on y va alors ? » Nicolas la suivit pour entrer dans le bar, remerciant en silence tout ce qui avait créé la parfaite synchronicité de cette soirée. L’empêchement de Suzie qu’il avait remplacée aujourd’hui. La neige qui l’avait obligé à venir à pied plutôt qu’en vélo. Le verglas qui l’avait conduit à marcher moins vite et à se concentrer sur ses pieds. Jamais il n’aurait cru dire ça, mais en s’asseyant en face de Jessica, il pensa que le hasard faisait parfois bien les choses.
————————-